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TÉMOIGNAGE. Fin de vie. "Je ne veux pas attendre d'être paralysée" : atteinte d'une maladie incurable, elle réclame un texte moins restrictif

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Publié le 25/04/2024 à 06h00 Écrit par Juliette Coulais et Clara Robert-Motta

Le projet de loi sur la fin de vie est examiné depuis mardi 23 avril à l'Assemblée Nationale. Dans les Deux-Sèvres, une femme atteinte de la maladie de Charcot a choisi de témoigner pour faire entendre la voix des premiers concernés. Pour elle, ce projet de loi n'est pas assez ambitieux.

Les premières années, Françoise Beaudoux n'a presque rien vu. Il y avait bien une sensation de perte de force dans le pouce gauche, puis quelque temps plus tard dans le pied droit, mais rien qui ne l'empêche de faire ses randonnées qu'elle aimait tant. Puis tout est allé très vite : pied gauche, toute la main gauche, donc l'incapacité de saisir puis de marcher longtemps et sans aide.

Petit à petit, la maladie s'installe. Françoise est envoyée de spécialiste en spécialiste. Elle finit par passer une batterie d'examens pendant une semaine à Limoges, centre de référence pour ce genre de maladies. "Ponction lombaire, prélèvement de glandes salivaires, électromyogramme, on m'a même pris du muscle à l'emporte-pièce, comme dans les gâteaux. C'était une semaine éprouvante", se remémore Françoise Beaudoux. Et en avril 2023, le diagnostic tombe comme un couperet : elle est atteinte de maladie de Charcot, une maladie neurodégénérative qui paralyse peu à peu les muscles.

Aujourd'hui, la Niortaise a 79 ans et voit la maladie prendre de plus en plus de place dans sa vie. "En 2023, il y a un an, je boitillais, mais je marchais sans cannes. J'ai pris la canne au mois de juin, puis j'ai dû arrêter de conduire, j'ai pris le déambulateur au mois de juillet et au mois de septembre, j'ai dû prendre un système électrique."

Alors que la maladie la paralyse petit à petit, elle lit dans les médias une tribune de son sénateur des Deux-Sèvres, Philippe Mouiller, contre le projet de loi sur l'aide à mourir. "Face aux souffrants, la vraie fraternité n'est-elle pas de tendre la main plutôt que de donner la mort", demande l'élu dans son texte qui estime que "céder à ce texte serait une facilité". Françoise Beaudoux est en colère à la lecture de la tribune. Elle qui n'a jamais écrit à un média ou à un élu se décide à lui envoyer une lettre pour porter la voix des malades dans sa situation.

Mon cœur est solide, je ne prends aucun traitement, ce qui veut dire que je peux rester des années totalement paralysée, sans pouvoir parler, seuls mes yeux et mon cerveau continueront de fonctionner… Est-ce la vie que vous nous souhaitez ?

Françoise Beaudoux

lettre envoyée au sénateur Mouiller

La patiente atteinte de maladie de Charcot estime, elle, que le texte ne va pas assez loin. Il prévoit d'accorder l'aide à mourir, dans des critères stricts, uniquement aux personnes au pronostic vital engagé à court ou moyen terme. Selon Françoise Beaudoux, il oublie par là une grande partie des malades. "Il faut enlever la notion de 'pronostic vital' et mettre le mot 'volontaire', défend-elle. Moi, je ne veux pas attendre d'être paralysée, et tant que le pronostic vital n'est pas engagé, les soins palliatifs n'auront pas le droit de me donner les cachets. Il faut attendre que je ne puisse plus déglutir ou ne puisse plus respirer.

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De plus en plus atteinte par sa maladie, Françoise Beaudoux appelle les élus à se mobiliser pour une loi sur l'aide à mourir plus ambitieuse et moins restrictive d'accès. • ©France télévisions

Elle entend envoyer son témoignage au député de Charente-Maritime, Olivier Falorni, actuellement rapporteur général de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi du gouvernement sur la fin de vie.

>> Lire aussi : Fin de vie. "Une force incroyable et une clarté absolue" : Olivier Falorni réagit à la lettre envoyée par Élisabeth Badinter

La sexagénaire a déjà listé de nombreuses fois ses possibilités, car elle le réaffirme, elle ne veut pas être entièrement paralysée. "Je me débrouillerai, est-ce qu'il faut que je commande des trucs sur internet ? Je ne vais pas me jeter du deuxième étage. En plus je ne peux pas enjamber la rambarde… Voyez où on en est ?"

Aujourd'hui, Françoise pense à son mari, sa famille. Elle sait que la loi arrivera trop tard pour elle. Mais veut tout de même faire entendre la voix des malades volontaires à partir. 

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